dimanche 30 juin 2013

Le voyage dans le passé, Stefan Zweig


Faisons une pause dans l’austenerie si vous le voulez bien. Aujourd’hui  je voudrais parler d’un livre que j’ai lu il y a déjà longtemps mais dont je n’avais pas encore pris le temps de parler… Le voyage dans le passé :


Louis, jeune homme pauvre mû par une "volonté fanatique", tombe amoureux de la femme de son riche bienfaiteur, mais il doit partir au Mexique pour une mission de confiance. La Grande Guerre éclate. Les retrouvailles du couple n'auront finalement lieu que neuf ans plus tard. Leur amour aura-t-il résisté? 



Dans ce texte bouleversant, resté inédit en français jusqu'en 2008, on retrouve le savoir-faire unique de Zweig, son génie de la psychologie, son art de suggérer un geste, un regard, les tourments intérieurs, les abîmes de l'inconscient.


De Zweig, j’avais seulement lu Le joueur d’échec que j’avais bien apprécié mais dont je garde finalement un souvenir vague. Une fois de plus je me suis dirigée vers une nouvelle. Là encore, je pense que je ne vais pas en garder une impression durable.

Ce n’est pas que je n’ai pas aimé mais je pense que cette histoire aurait mérité un plus long développement pour nous permettre de nous attacher réellement aux personnages. C’est ce qui m’a manqué : la force desdits personnages. L’histoire était prometteuse, potentiellement émouvante : les rendez-vous manqués ont le don de me bouleverser. J’ai d’ailleurs une petite anecdote à ce sujet : mon professeur d’espagnol de Khâgne aussi aimait particulièrement ces situations. Il nous avait donné la traduction qui n’existe pas littéralement mais qui est très belle, peut-être plus sensible que le terme français : un desencuentro (une non-rencontre, une "dé-rencontre")… C’est beau, n’est-ce pas ? 

Pour revenir au Voyage dans le passé, je trouve que cette œuvre se situe entre la nouvelle de par sa brièveté et son dénouement rapide, et le roman de par son histoire au long cours et l’attente créée autour des personnages ;  mais qu’elle n’exploite par le fait ni l’une ni l’autre des dimensions ce qui empêche d’y trouver l’étincelle. Peut-être que si Zweig avait eu le temps de la retravailler, aurait-il privilégié l’une ou l’autre voie (ce texte a été retrouvé après sa mort et publié à titre posthume) ?

D’autre part, l’écriture m’a paru, elle-même, distante. Je trouve que la plume est compliquée, tout ce qui est décrit m’est apparu comme dans le brouillard, flou, comme si les souvenirs des protagonistes n’étaient pas aussi vivaces que l’auteur voulait nous le faire croire. Cependant, on ne peut que remarquer la qualité de l’écriture au-delà de sa complexité. Peut-être n’étais-je pas assez réceptive à ce style très poétique au moment où je l'ai lu, ce qui est possible, néanmoins cela me permet d’insister sur le fait que ce livre n’a pas réussi à retenir mon attention.


Je conclurai en soulignant que d’autres avis sont beaucoup plus enthousiastes que le mien comme ici ou mais que je suis finalement restée indifférente à ce texte. Je pense que je lirai bientôt une autre œuvre de Stefan Zweig, un roman cette fois, pour peut-être, enfin, apprécier cet auteur à sa juste valeur !


♥♥♥♥♥

mercredi 5 juin 2013

Orgueil et préjugés... en deux adaptations


Après ce long article sur les romans de Jane Austen, je vous propose de rester dans la même thématique avec  un retour sur les adaptations des œuvres que j’ai visionnées à ce jour. Commençons par   Orgueil et préjugés dont j’ai vu les deux adaptations principales : la mini-série de 1995 et le film de 2005. Je ne saurais dire quelle adaptation j’ai préféré. Les deux sont très réussies !

De par le format, le texte est parfaitement respecté et mieux retranscrit dans la série. Mieux que dans le film qui  saute quelques passages.

En outre, les décors de 1995 sont particulièrement fouillés pour correspondre à la perfection à l’univers de Jane Austen. Cependant, j’ai préféré le film de ce point de vue parce que, malgré ces raccourcis et partis pris discutables, il est plus esthétique, mieux filmé et plus lumineux que ce soit en intérieur ou en décors naturels. En fait, je trouve que la série a assez mal vieillie sur ce point. Mais votre avis est peut-être différent ?

Par ailleurs, si la série permet d’approfondir les personnages et de bien exploiter l’histoire, je la trouve un peu statique tandis que le film permet de maintenir un rythme dynamique (ce n’est pas toujours heureux mais dans l’ensemble, je trouve cela réussi). Là encore, je pense qu’il s’agit d’une simple question d’époque. Chacune des œuvres a les défauts de ses qualités en réalité.

Je ne suis pas une spécialiste de l’histoire de la mode mais je trouve que les costumes se valent dans les deux adaptations. Peut-être sont-ils plus fidèles dans la série mais plus fins dans le film. Pour les coiffures, je pense aussi que la série est plus réaliste mais c’est parfois assez moche contrairement au film où elles sont assez jolies (sauf Elizabeth qui, en dehors des bals, a toujours les cheveux en pétard, c’en est désespérant).

Comme dans le roman, la grande force d’Orgueil et préjugés tient aux personnages. Alors passons au casting ! Ah le casting… Globalement, je préfère les acteurs choisis pour le film mais… il y a quelques exceptions et de taille, sinon, ce ne serait pas drôle !




Elizabeth Bennet 1995




Elizabeth Bennet  2005

Dans les deux cas, je suis mitigée… Physiquement, les deux correspondent à l’image que je me faisais de Lizzie mais leur jeu me dérange. Elles minaudent, elles ont toujours ce petit sourire moqueur, jamais franc. Ca me stresse… Jennifer Ehle (1995) a peut-être un peu plus de nuances (mais le format de la série aide il faut dire) et Keira Kightsley plus de fraicheur.




1995 Fitzwilliam Darcy 2005

Bon. Je crois qu’il n’y a pas photo. Colin Firth est M. Darcy. Alors, si Matthew Macfadyen (2005) ne démérite pas, il est terne,  moins distingué, moins Darcy. Il ne peut pas lutter. Voilà.




 Jane Bennet 1995 




  Jane Bennet 2005

Je ne peux tout simplement pas comprendre pourquoi ils ont choisi Susannah Harker (1995) pour jouer Jane. Elle est agaçante, lourde, pas assez jolie (non franchement que tout le long du film on nous dise qu’elle est plus jolie que Jennifer Ehle et que toutes les filles du village… de qui se moque-t-on ?). Non, je dis non. Tandis que Rosamund Pike est parfaite ! Douce, belle et solaire, j’aime tellement la scène où elle accepte la demande en mariage !




Lydia Bennet 1995 




Lydia Bennet 2005

J’aime autant l’une que l’autre ! Elles correspondent parfaitement au rôle, aussi insupportables l’une que l’autre ^^ Elles donnent une belle envergure au personnage !




Charles Bingley 1995



Charles Bingley 2005

Les deux acteurs sont très bons et fort sympathiques mais j’ai une préférence pour Crispin Bonham-Carter de 1995. Je trouve que dans le film, le réalisateur a rendu un Bingley fade et à l'air un peu idiot.



 

1995 George Wickham 2005

Là encore, les deux me plaisent. Adrian Lukis de 1995 a l’air plus perfide, tandis que Ruppert Friend de 2005 se rapproche davantage d’un enfant gâté. Mais finalement, ce sont deux facettes de la personnalité de Wickham qui sont bien exploitées.




Mr Collins 1995




Mr Collins 2005

David Bamber de 1995 est tellement fidèle au roman. Je ne sais pas comment ils l’ont trouvé mais difficile de faire mieux ! Il est brillant de ridicule. Tom Hollander de 2005 joue un personnage différent mais assez convainquant aussi. Certainement beaucoup plus triste.




Mr Bennet 1995



Mr Bennet 2005

J’ai beaucoup aimé l’acteur de 1995 (Benjamin Whitrow) mais Donald Sutherland du film est tellement plus émouvant ! Le réalisateur a réussi à réduire ses apparitions tout en faisant en sorte que chacune d’elle soit inoubliable : humour, tendresse, émotion ! Il en devient un de mes personnages préférés. La scène de fin est particulièrement touchante quand il accorde la main de Lizzie à Darcy.


Pour le reste du casting, je dois dire que les deux adaptations sont plutôt convaincantes même si j’ai une préférence pour celle de 2005 : une madame Bennet moins agaçante, une Georgiana plus douce (mais on dirait qu’elle sort du lit…), une Caroline Bingley plus peste, et une Charlotte Lucas plus vivante et émouvante.


Enfin, je dirais que les différents moments clés de l’histoire sont bien traités dans les deux œuvres, parfois de façon similaire, parfois différemment, mais toujours avec délicatesse et humour !


Finalement, je ne vous aide pas à choisir l’une ou l’autre des adaptations… C’est parce qu’il faut voir les deux ! 


A bientôt pour parler des adaptations de Northanger Abbey et Mansfield Park !

samedi 1 juin 2013

Trois nuances de Jane Austen


Après  Orgueil et Préjugés, j’ai continué ma découverte de Jane Austen avec Northanger Abbey puis Mansfield Park et enfin Raison et sentiments ; et je ne suis pas déçue !



Northanger Abbey, en particulier, a été un joli coup de cœur ! Ce roman est une œuvre un peu différente des autres romans que j’ai pu lire de Jane Austen. 

Catherine Morland, à 17 ans, est une héroïne en devenir.  Passionnée de romans de romans gothiques et "spécialiste" en la matière, elle est toutefois on ne peut plus naïve dans la vie quotidienne.  Lorsque les Allen, couple sans enfants, décident de l'amener à Bath pour la saison, Catherine rêve de voir sa vie d'héroïne commencer.   

Le ton à la fois ironique et bienveillant de l’auteur est unique et bien senti. Ce court roman est un prétexte pour Jane Austen qui s’amuse (et nous amuse) en caricaturant les romans gothiques. Mais, sauf erreur de ma part, on sent chez elle un petit quelque chose d’admiration pour ces romans, à travers le personnage de Catherine notamment mais pas seulement. Aussi la critique se fait elle drôle et gentille, et donc très agréable !

Par ailleurs, les ambiances créées entre la modeste demeure des Morland, l’agitation fiévreuse de Bath et la splendeur austère de Northanger apportent ce qu’il faut de variations, de rebondissements et forment un tout fort sympathique. 

Mais je pense que le charme de ce roman tient à des personnages tous plus aimables les uns que les autres ! Quoique non, en fait, certains sont détestables… Mais les gentils le sont tellement (adorables), jusqu’à la naïveté que c’en est touchant et que cela donne une intrigue « trop mignonne » ! Catherine est très attachante dans son ingénuité. On suit avec plaisir sa découverte du monde, ses aventures, ses joies et ses déboires. Henry Tilney est un personnage, s’il n’est pas aussi approfondi que d’autres personnages masculins de Jane Austen, est du moins vraiment aimable, sans part d’ombre. On ne sombre pas dans le cliché de l’homme blessé et ténébreux. Bref, pour ma part, il tient pour l’instant la première place de mon classement des héros de Jane Austen !

Certes, l’histoire n’est pas novatrice, le dénouement est prévisible… Mais quel bonheur d’accompagner Jane et ses personnages dans cette histoire !

♥♥♥♥♥






Plus tard, je me suis plongée dans l’univers de Mansfield Park. Je trouve remarquable la manière qu’a Jane Austen de créer des schémas si similaires dans ses différents romans et d’en faire à chaque fois pourtant un univers particulier que l’on découvre avec plaisir !

Fanny Price a été accueillie à Mansfield Park par son oncle et sa tante alors qu'elle avait 10 ans, ceux-ci souhaitant rendre service à sa mère qui, ayant fait un imprudent mariage, avait de la difficulté à faire vivre sa nombreuse famille.  Elle grandit donc auprès de ses deux cousines - Maria et Julia - et ses deux cousins - Tom et Edmund - tout en étant toujours traitée comme une parente inférieure par tous à l'exception d'Edmund.   La très vertueuse Fanny voit bientôt ses sentiments pour Edmund passer de la simple affection à l'amour mais l'arrivée à Mansfield de Miss Crawford - de laquelle s'éprendra Edmund - et de son frère viendra causer beaucoup d'émois aux habitants de Mansfield Park.

Cependant, j’ai personnellement trouvé Mansfield Park un peu en deçà de mes deux précédentes lectures. Ce roman est un peu plus long et sa lecture s’est révélée plus laborieuse. Je mets en grande partie cela sur le compte de personnages moins attachants, à la fois plus longuement et moins précisément décrits. J’ai par-dessus tout trouvé Fanny terne et presque ennuyeuse. Je n’ai commencé à lui porter de la sympathie que sur la fin du roman. Pour Edmund, ce fut l’inverse, s’il m’a charmé au début, son aveuglement et ses tergiversations m’ont agacée au fur et à mesure que l’histoire avançait. En outre, je trouve que peut-être le roman gagnerait à être quelque peu abrégé, avec moins de rebondissements qui donnent plus une impression de tourner en rond que de dynamiser l’intrigue (la mise en scène de la pièce de théâtre par exemple m’a paru lourde et peu à propos ; en fait, la volonté d’insérer une dimension de critique sociale était assez malvenue selon moi, ici).

Ceci dit, j’ai apprécié cette lecture de par l’atmosphère créée, les personnages secondaires et les « méchants » bien travaillés, et toujours pour la plume de Jane Austen, piquante et tendre à la fois !

♥♥♥♥♥





Enfin, j’aimerais parler de mon véritable coup de cœur : Raison et sentiments !

En amour comme en tout, rien n’a changé depuis le XIXème siècle. Si la fougueuse Marianne s’abandonne à une passion qui menace de lui brûler les ailes, la sage Elinor prend le risque de perdre l’amour à force de tempérance ? Raison et sentiments : impossible équation ? Les deux jeunes femmes devront apprendre de leurs vacillements. Pour le meilleur et pour le pire. 

C’est bien simple, j’ai tout aimé ! Je n’y pas retrouvé les quelques points négatifs qui avaient pu me gêner dans Orgueil et préjugés. 

En réalité, je ne sais pas trop comment décrire mes impressions… J’ai trouvé ce roman parfaitement mené avec des personnages emblématiques, une intrigue pleine de revirements bienvenus, une écriture fine et nuancée pour une Angleterre fascinante de la campagne sauvage à l’agitation londonienne ! 

Evidemment, l’auteur nous parle encore de jeunes filles de bonnes familles mais sans le sou et de leurs amours ; cependant, le charme opère toujours et d’autant plus dans Raisons et sentiments. Pour ma part, j’ai été particulièrement sensible à la relation entre Marianne et Elinor, par les similitudes entre leurs situations et leur manière différente d’affronter les obstacles. Je ne parviens pas à choisir mon camp définitivement entre les deux sœurs mais je crois que je me vois plus en Elinor : d'abord parce que je dessine mieux que je ne chante ^^ et puis parce que l’élu de son cœur, tout comme sa vision du bonheur me parlent davantage que ceux de  Marianne. 

De ce roman, les seuls reproches que je pourrais faire sont le manque de développement de certains personnages secondaires et une fin un peu rapide (voire beaucoup trop rapide pour Marianne). Le reste est parfait !


♥♥♥♥♥




Je suis triste de penser qu’il ne me reste que quelques romans de Jane Austen à découvrir… Il faudra ensuite se contenter du plaisir de la relecture !